mardi 28 juin 2011

CRISTALLISATION ET POTENTIEL DE L'EFFET DE VIE DANS « LA SCÈNE » DE JACQUES PRÉVERT.

Innocent Claude MBARGA
 Université de Yaoundé I : F.A.L.S.H. /ENSDrt / Élève PLEG
 CRISTALLISATION ET POTENTIEL DE L'EFFET DE VIE
 DANS « LA SCÈNE » DE JACQUES PRÉVERT. 
(Remerciement à tous les camarades qui ont contribué à la finalisation de ce travail.)  

  INTRODUCTION 
En montrant dans l'« effet d e vie » ou le singulier de  l'art littéraireiqu e la plurivalence et l'ouverture sont les traits caractéristiques de l' « effet de vie » qu'il définit comme « vie artificielle »iide l'œuvre, Marc Mathieu Münch démontre autrement que parmi les quatre  « invariants » de sa méthode, l' « effet de vie » subsume les trois autres invariants. Comment ? pour notre part, si la plurivalence désigne « l'ensemble des procédés littéraires capables de disperser la chose dite dans toutes les facultés de l'esprit »iii, elle peut bien intégrer en son sein le concret des mots et le jeu des mots en tant que manifestations formelles (perceptibles), quasi formelles et linguistiques de l' « effet de vie ». Quant à l'ouverture de l'œuvre, ne se confond-elle pas à l' « effet de vie » lui-même à partir de la cohérence de l'œuvre et dans la mesure où elle « à le pouvoir d'entraîner la collaboration particulière d'un esprit individuel » ?Ces reformulations théoriques faites, il convient de nous demander en quoi consisterait une analyse fondée sur la cristallisation et le potentiel de l' « effet de vie » dans La Cène de Prévert. Autrement dit : de quel potentiel un quintil – La Cène est un poème de cinq vers – peut-il répondre pour rendre visible un « effet de vie » total et satisfaisant chez le « lecteur-auditeur » d'aujourd'hui ? En réorganisant les traits caractéristiques de l' « effet de vie » en tant qu'invariant et les trois autres invariants de la méthode münchienne autour d'une lecture-réception intertextuelle, nous allons analyser le texte sur deux axes  (1° : Du jeu des mots au concret des mots ; 2° : Plurivalence, cohérence et ouverture) afin de montrer comment l' « effet de vie » qu'inaugure le titre du poème se cristallise dans tout le texte à travers un univers biblique et chrétien équivoque.
 I.DU JEU DES MOTS AU CONCRET DES MOTS 
Dans la théorie de Münch, « le mot descend de l'abstraction et sort de la platitude des images du dictionnaire pour entrer dans l'univers concret des êtres et des choses.»ivC'est dire au sens de Barthesvque le mot est au fondement des possibilités significatives de référenciation parce qu' « il dit [la] vie »vi, sa vie que le lecteur doit interpréter dans l'univers des possibles psychologiques et psychiques, lesquels il se partage avec l'écrivain ou le poète. Examinons d'abord le jeu des mots dans La Cène avant de parvenir à l'évaluation du concret des mots. 
I.1- La pertinence du jeu des mots
 Le rapport que l'on peut établir entre le titre du poème et son « contenu » ou « signifié » s'interprète facilement sous l'angle du jeu des mots en littérature. A considérer que « le mot n'est mot que parce qu'il est en usage »vii, on s'aperçoit à l'évidence qu'entre le titre et son développement le poète instaure un « jeu avec les mots pour créer des formes »viiisignifiantes, c'est-à-dire des unités de signification recevables et interprétables par la plupart des sens. En fait, dans La Cène, un jeu homophonique prévaut qui trompe l'ouïe et sème ainsi un certain doute dans l'esprit du « lecteur-auditeur ». Auditivement La Cène fait place à une « scène » quelconque, obligeant la psyché à se fier plutôt à l'ouïe qu'à la vue. En outre, en maintenant l'ambiguïté sémantique favorisée par le jeu homophonique, le jeu des mots inaugural occasionne un autre jeu corollaire qui lui est soumis. Il s'agit de l'isotopie du repas. Celle-ci prend source sur l'expression « être à table » (au premier vers) qui sous-entend, sur le plan sémique, un couvert et des convives. Mais contre toute attente cette isotopie prend fin dans le vers suivant. À peine commencée, elle cesse d'être matérielle pour se fondre dans une immatérialité (au troisième vers), renvoyant désormais à l'état d'esprit. Provisoirement. Puisque dans les deux derniers vers la matérialité refait surface en déviant le cadre sémantique des deux premiers vers pour s'affirmer par une acception technique du terme « assiette ».On peut donc dire que l'isotopie du repas n'est qu'un pré-texte technique et esthétique, un tremplin qui, parce qu'il est préliminaire, joue davantage sur le champ sémantique de « assiette », lequel se déploie clairement à trois niveaux. Dans les deux premiers vers, même si le terme « assiette » est absent, il n'est d'aucun doute qu'un repas que l'on prend « à table » nécessite l'usage des « assiette(s) » (« Pièces de vaisselle [individuelle ?] dans laquelle on mangeix ») ; dans le troisième vers, l'expression idiomatique « être dans son assiette » connait un emploi sous modalité négative pour signifier ne pas « être dans son état, son équilibre normal physique ou moralx » ; dans les quatrième et cinquième vers, « l'assiette » « toute droite/ Verticalement derrière leur tête » met en relief le sens technique de « support, élément qui maintient un corps dans une position donnéexi »Delà, vouloir rétablir l'identité, singulière ou plurielle, de ceux qui « sont à table », ceux qui « ne sont pas dans leur assiette » et ceux dont l' « assiette se tient toute droite/ Verticalement derrière leur tête » oblige qu'on parvienne à une référenciation du pronom personnel « ils », et à donc un examen du concret des mots.
I.2- la question du concret des mots 
La question référentielle du « ils » dans La Cène est étroitement liée à la notion du concret des mots. Sa nature l'en prédispose puisque, sur la grille des catégories grammaticales, « ils » est un pronom personnel masculin pluriel. Comme tel, il fonctionne anaphoriquement ou nominalement. C'est le second usage qui prévaut ici et qui occulte la possibilité de référenciation. Du coup, on se rend compte que le poète joue de nouveau avec les mots car l'indétermination du « ils » laisse une grande ouverture d'interprétation au lecteur à l'intérieur des multiples possibilités qu'offre le mot in extenso. A vouloir comprendre ce « ils » par rapport au titre du poème, on peut soutenir qu'il désigne Jésus Christ et ses disciples ; à le rapprocher de la « scène » que suggère l'ambiguïté homophonique, on s'accordera qu'il désigne des sujets quelconques ; à conditionner son interprétation par la « scène » et La Cène, on avancera vers une généralisation qui à bien des égards interpellera le christianisme et la chrétienté.En réalité, toutes ces hypothèses deviennent pertinentes à partir du moment où, tout compte fait, il s'affirme que le dispositif lexical à référenciation matérielle dominant est de loin bien moins important que celui immatériel qui concentre la symbolique du texte. Dans ces conditions, le sens des mots n'est plus productif que par ses possibilités à motiver l'œuvre, à l'animer grâces aux « sens » et à la référenciation quasi concrète des mots. Cela semble ce que soutient Riffaterre à propos du « message poétique »: « un poème nous dit une chose et en signifie une autrexii». 
II. PLURIVALENCE, COHERENCE ET OUVERTURE DU TEXTE
 Nous sommes obligés de rappeler ceci : dans ce travail, notre position est que le jeu des mots et le concret des mots en tant qu'invariants de l'art et corollaires de l' « effet de vie » ont partie liée avec la plurivalence qui n'est qu'un trait caractéristique de cet « effet de vie » englobant, parce qu'il est un « ensemble des procédés littéraires ». Aussi vient-il qu'en posant une relation de contigüité et de linéarité entre Plurivalence, cohérence et ouverture dans La Cène, nous nous interrogeons comme Antoine Compagnon : « Que fait le lecteur quand il lit ? Et que lui fait le texte ? La lecture est-elle active ou passive ? xiii» Pour les besoins d'analyse, nous considérons que la plurivalence, la cohérence et l'ouverture d'un texte ressortissent à une lecture à la fois active et passive – en quoi et comment ? C'est ce qu'on va tenter de montrer.
I.1 De la plurivalence 
A partir du titre, nous avons montré plus haut comment le choix des mots maintient l'incertitude dans l'esprit du « lecteur-auditeur » quant à la [sεnә] dont il est question. Pourtant a priori, on sait que le titre nomme effectivement le(s) repas pris par Christ et ses disciples. Si sur le plan de l'écriture la synecdoque ouvre le texte à travers le terme « table », « table » réfère bien à l'acte du repas désigné dans la périphrase « être à table », c'est-à-dire dîner, manger, etc. du point de vue sensoriel, tandis que les yeux observent une table, la psyché éveille le goût et l'odorat parce qu'il est bien question d'un repas.De cet ambiance synecdochique dériveront l'antanaclase sur le mot « assiette » – il a été établi que le glissement sémantique opéré à trois nivaux participe du potentiel cognitif relatif au jeu des mots. Reste à préciser que ces glissements sémantiques se bipolarisent en donnés matériel et immatériel, suscitant ainsi la présence ou l'absence du sens du toucher – et l'anaphore sur le pronom personnel nominal « ils » (indéterminé textuellement).En somme, puisqu' « en littérature, le langage du sens s'enrichit d'un langage des sens qui habilement réalisé, crée un effet de dispersion dans psychéxiv », il découle que – la plurivalence l'autorisant – l'incohérence des deux derniers vers (« Et leur assiette se tient droite / Verticalement derrière leur tête ») appelle une lecture allégorique, c'est-à-dire symbolique, capable de rendre au poème sa « cohérence » en l'ouvrant au « lecteur-auditeur ».
II.2- De la cohérence à l'ouverture
Pour Münch, la cohérence est « la force qui rassemble les éléments d'une œuvre dans une structure calculée pour que leur union et leur unité soient clairement repérables [...] allant du tout à chaque élément, de chaque élément au tout et d'un élément à un autrexv.» Concrètement, les suggestions faites par les éléments linguistiques du texte – lesquels cessent d'être linguistiques selon Münch en littérature pour appartenir à la « vie de l'esprit »xvi- nous entrainent dans deux univers d'interprétation : la cène chrétienne et la « scène » quelconque.De toute évidence, notre psyché est plus interpelée par La Cène dans la mesure où celle-ci éveille chez le lecteur des souvenirs bibliques. Et si effectivement La Cène « peut réussir en effet de vie un peu profonde »xvii, ce n'est qu'à travers « la collaboration particulière » entre sa structure globale et l'univers mentale du lecteur ; c'est-à-dire à travers les réminiscences qui se redéployent dans le texte, lesquels interpellent toujours le lecteur, lesquels le lecteur redécouvre ici à partir du champ lexical du repas. On peut lire dans l'Evangile de Luc : « Finalement, quand l'heure arriva, il s'étendit sur la table, les apôtres avec lui ... Il prit le pain, [rendit grâce], le rompit et le leur donna en disant : ''ceci représente mon corps qui va être donné pour vous...xviii »A mi-parcours on s'accorde donc sur ce que le poète redit l'Evangile par la pratique intertextuelle. Observation provisoire car contrairement à ce que nous apprend les textes des Evangélistes, dans La Cène de Prévert nous assistons à une [sεnә] des plus étranges : « ils ne mangent pas ». Le troisième vers du poème peut certes apporter une justification de principe à cet état de chose (« Ils ne sont dans leur assiette ») mais il ne nous amène guère à minimiser la prégnance de l'univers biblique qui règne à demeure dans le texte et convoque potentiellement « Les Saintes Ecritures ». Lisons maintenant l'épître de Paul aux Corinthiens : « Quand donc vous vous réunissez dans un même lieu, il n'est pas possible de manger le repas du Seigneur. En effet, lorsque vous le mangez, chacun prend d'abord son repas ... vous avez bien des maisons pour manger.»xixEn réalité une tension permanente se crée entre le titre suggestif du poème et le deuxième vers qui légitime l'idée d'un repas, repas sans menu puisque celui-ci – Christ – n-est pas comestible au sens propres du mot. Justement, en ce qui est de la chair et du sang, la doctrine chrétienne radicale en interdit l'usage et la consommation depuis les écrits génésiaques. Le lecteur chrétien le sait : « Seulement la chair avec son âme – son sang – vous ne devez pas la mangez.»xxCe tissu intertextuel qui montre qu'un hypertexte préside à la mise en forme de l'hypotexte que constitue La Cène montre en même temps les failles et les contradictions de la religion chrétienne. Le paradoxe de l'écriture prévertienne de La Cène se justifie ainsi par le paradoxe des contradictions chrétiennes pour le moins incernables en contexte profane. Que peut-on bien manger sur une « table » aux assiettes vides ? Il semble en effet que le poète voit dans la religion chrétienne une « assiette » vide qui n'a rien à offrir à l'humanité sinon la fantaisie d'une existence, du moins l'héroïsme précaire d'un groupe d'individu ayant à sa tête un héros décevant comme le Christ.L'acception technique du mot « assiette » exploitée dans les deux derniers vers exploités plus haut propose d'une certaine manière l'explication secondaire du troisième vers dont les analyses viennent d'être faites. Toutefois, on peut aller plus loin en spéculant que le déséquilibre moral et physique qui ressortit à l'immatérialité imposée par la locution verbale « ne pas être dans son assiette » fait resurgir les traces des écrits bibliques. Comment s'interdire d'envisager que cette perturbation de la conscience soit in fine celle qu'éprouvèrent le promoteur de la « Nouvelle Alliance » et ses disciples à l'approche de sa mise à mort ? Même si la chronologie des faits tels que rapportés par les évangiles ne précise pas le genre de mort dont il sera question – y a-t-il une mort qui ne fasse peur ? -, on s'accordera néanmoins à dire que le poète de La Cène joue avec ses connaissances bibliques pour rétablir « habilement » que le corps du Christ qui aurait dû être servi dans une « assiette » (au sens de pièce de vaisselle) est plutôt servi sur une assiette (au sens technique de support et donc de croix ou potence). Visiblement, l'idée de la potence ébranle ainsi le héros de la « Nouvelle Alliance » et ses compagnons ; elle les fait ne plus être « dans leur assiette ». Convoquons encore L'Evangile de Luc pour prouver que la crainte domine le cénacle et le Christ: « Père si tu veux, écarte cette coupe [de douleur] de moi [Jésus] ... Alors un ange du ciel lui apparut et le fortifia. Mais étant pris d'angoisse, il continua à prier de façon ardente »xxiAvant de finir cette analyse, revenons un tant soit peu sur le repas mis en cause ici : pourquoi donc l' « assiette » est vide ? Pourquoi « ils [le cénacle du Christ] ne mangent pas » ? C'est que ce repas n'est et n'est que symbolique dans l'idéologie chrétienne. Il ne s'agit pas d'un repas matériel mais d'une communion spirituelle entourée de mystère. Le Pape Paul VI explique : « Nous croyons que le pain et le vin consacrés par le Seigneur lors de la dernière cène sont devenus son corps et son sang qui devaient être offerts pour nous sur la croix »xxiiL'univers allégorique et symbolique occupe ainsi une place considérable dans La Cène parce que la Cène elle-même n'est que représentation et symbole. Les commentateurs de la Bible soulignent dans ouvrage théologique fort érudit qu' « on devait donc penser qu'il fallait manger sa chair et boire son sang dans un sens figuré en exerçant la foi dans la valeur de son sacrifice humain parfait .»xxiiiSi dans cette concentration rigoureuse des fondamentaux du christianisme Christ est le support-assiette, vider ce « support », lui refuser un contenu n'est rien d'autre qu'évacuer la vérité essentielle de la religion chrétienne à travers ses propres contradictions et ses antagonismes. Donc, parce que « le christianisme, élément de cet ordre dominant, ne peut qu'assumer une fonction idéologique et sociale»xxiv, Prévert s'en sert également pour bâtir son idéologie : l'antichristianisme. C'est à ce niveau que la polysémie du terme « tête » va jouer pleinement pour marquer le soutien que la première communauté chrétienne a apporté au Christ pendant son ministère et sa passion en tant que « tête », c'est-à-dire « Personne qui conçoit et dirige (comme le cerveau fait agir le corps) »xxv. Or l'attitude immobile que suggère ce «  toute droite / verticalement », laisse planer dans l'univers textuel l'ombre d'un refus. Ce refus se confirme dans le deuxième vers lu maintenant dans une autre perspective. Là, toute la symbolique de la Cène se totalise – en confirmant les propos du Pape Paul VI – et s'oriente vers la « consommation » de la doctrine chrétienne ; mais une doctrine qui ne fait pas l'unanimité des chrétiens et se heurte à bien de refus. Avant cette remise en cause poétique du christianisme dans La Cène, le protestantisme ne suffit-il pas pour établir que l'édifice chrétien est mal fondé et mal soutenu ?
CONCLUSION
Au sortir de cette analyse, sommes-nous en droit de nous accorder avec Münch sur ce qu' « en dehors de l'effet de vie, elle [la lecture] ne doit rien vouloir. Si elle se fixe sur un projet précis de repérage d'une forme, d'un thème, d'une thèse, voire d'une vérité, elle prend le risque d'empêcher le miracle de la vie artificiellexxvi » ? Evidemment. Puisque les analyses faites autour du jeu des mots et du concret des mots ont révélé « une forme » du texte qui se prédispose ludiquement à se mettre potentiellement au service de la cristallisation d' « un thème » (le christianisme) et par conséquent d' « une thèse » (l'antichristianisme). Autant dire que la mise en évidence de l'effet de vie et ses corollaires – auxquels nous avons associé indéfectiblement ses traits caractéristiques – a bénéficié de l'apport du champ sémantique de « tête » et d' « assiette », du champs lexical de repas et de trois figures de style importantes (la synecdoque, l'anaphore et l'antanaclase). Précisons que ce dispositif essentiel s'appuie exclusivement sur le jeu homophonique de départ avant d'ajouter que l'effet de vie probant qui irradie La Cène se cristallise en « une vérité » : les contradictions et les antagonismes chrétiens. Après lecture, on résumerait donc la « thèse » du poète ainsi : plutôt qu'une idéologie à promouvoir, le christianisme est une doctrine à rejeter. Mais le texte n'est pas aussi péremptoire que cela. Il faut nuancer et le texte nuance : pour les adeptes du christianisme, le ministère chrétien est à continuer ; pour les antichrétiens, comme le poète, il est question de se libérer de celui-ci. En cela Prévert « prend le risque d'empêcher le miracle de la vie artificielle », il évite l'utopiexxviiqui s'oppose à l'effet de vie. C'est dans ce sens que nous pouvons du moins comprendre les propos de Mukendi Nkonko : « Le christianisme apparaît comme une force sociale [peu] susceptible de contribuer à la libération des peuples.xxviii 
BIBLIOGRAPHIE
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NOTES
i Marc Mathieu Münch, l'« effet de vie » ou le singulier de l'art littéraire, Paris, Champion,
ii M. M. Münch, Op. cit., p.35. mais l'adjectif « artificielle » doit se comprendre au sens le plus mélioratif.
iii Ibid. p.164.
ivM. M. Münch, Op. cit. p.47.
v Dans le Degré zéro de l'écriture, Paris, Ed. du Seuil, 1972, pp. 37-38, Roland Barthes affirme que
vi M. M. Münch, Op. cit. p.47
vii M. M. Münch, Op. cit. p.36.
viii Id.
ix Alain Rey et Alii., Le Grand Robert de la langue française, 2001 édition numérique.
x Id.
xi Id.
xii Michael Riffaterre, Sémiotique de la poésie, Paris, Ed. du Seuil, 1983, p.11.
xiii Antoine Compagnon, Le Démon de la théorie, Paris, Seuil, 1998, p.49
xiv M. M. Münch, Op. cit. p.172
xv M. M. Münch, Op. cit. p.259.
xvi Ibid., p. 59. Münch affirme que « lorsque le texte entre dans la psyché, il n'est plus linguistique »
xvii M. M. Münch, Op. cit. p.36.
xviii Les Saintes Ecritures. Traduction du Monde Nouveau, 1995, Luc 22 : 14,19, P.1307. toutes les références bibliques qui vont suivre sont tirées de cette version.
xix 1 Corinthiens 11 : 20, 22, p.1422.
xx Genèse 9 : 4, p.16.
xxi Luc 22 : 42, 44.
xxii Passage tiré de Official Catholic Teachings, Christ Our Lord, Wilmington, Amanda watlington, 1978, P.11.
xxiii Comment Raisonner à partir des Ecritures, NewYork.Watchtower Bible and Tract Society of NewYork,1986,p.247.
xxiv Mukendi Nkonko, Le christianisme en Afrique : Genèse et fonctions sociales, in Peuples noirs/Peuples africains, n°47, 8èmeannée, Septembre-octobre 1985, p.22.
xxv Le Grand Robert de la langue française, op. cit.
xxvi M. M. Münch, Op. cit. p.108.
xxvii Depuis les premières recherches de Paul Ricœur, l'utopie fait l'objet de plusieurs recherches en littérature.
xxviii Mukendi Nkonko, Op. cit. p.23. 

LA PAROLE ET LE DISCOURS CHEZ LES BETI DU CAMEROUN

LA PAROLE ET LE DISCOURS CHEZ LES
 
BETI DU CAMEROUN

SOMMAIRE

In troduction générale
I. PAROLE ET DISCOURS : APPROCHE LINGUISTIQ UE
ET SOCIOCULTURELLE
I.1- Parole et discours en linguistique générale

I.2- Le couple parole/discours chez les Beti

II.DES FONCTIONS DE LA PAROLE OU DU DISCOURS
II.1- Les fonctions singulières
II.2- Les fonctions dynamiques
III. DU FONCTIONNEMENT DE LA PAROLE OU DU DISCOURS
III.1- De la littérarisation du discours
III.2- De la ritualisation du discours et de la parole
Conclusion générale
Bibliographie
Table des matières


Introduction générale 
Comprendre la parole béti c'est l'envisager dans une perspective discursive en la rattachant au pouvoir des mots, à la puissance du verbe génésiaque qui soumet l'univers, le transforme et lui assigne un destin particulièrement nouveau. En d'autres termes, c'est reconnaitre le caractère sacré de la parole béti qui traduit leurs origines nobles et divines.
Une approche diachronique nous permet de situer linguistiquement les Béti par rapport à une ascendance lointaine constituée par l' «Ati »i, langue des hommes initiés à laquelle les femmes n'avaient pas d'accès. Littéralement « Ati » désigne la noblesse, la dignité. Par dérivation préfixicale, « beti » est la pluralisation, conforme au système linguistique fang-beti, de « Ati ».
Du point de vue des familles de mots, Beti partage le radical « ti »ave c « nti », le Seigneur, le créateur, Dieu. Les Beti sont ainsi selon la mythologie transmise par le « Mvet », les fils des Ekang, eux-mêmes descendants de Dieu. En tant que descendants des dieux, les Beti ne peuvent être que dépositaire de la « parole sacrée » dont parle Francis Bebeyii. Parole agissante, parole ritualisée et littérarisée puisque dotée d'un pouvoir et mise en fonctionnement.
Dans notre ce propos, afin de construire un discours recevable sur la parole chez les Beti, nous nous proposons de recirconscrire dans un premier moment les rapports parole/discours en linguistique générale et dans le contexte beti afin d'en dégager, au deuxième et eu troisième moment, les fonctions et le fonctionnement.


I. PAROLE ET DISCOURS : APPROCHE LINGUISTIQUE
ET SOCIOCULTURELLE
Cette partie se justifie par le fait que la conception de la paro le et du discours tels analysés par la linguistique générale échappent aux descriptions les plus courantes lorsque l'on situe l'analyse dans l'aire beti. Il s'agit donc de montrer d'une part le fonctionnement parole/discours en linguistique générale et d'autre part la conception Parole/discours dans le cadre restreint de la socioculture beti.


I.1- Parole et discours en linguistique générale
En linguistique générale on a souvent étudier la langue par opposition à la parole ou bien en rapport à la fois avec le discours et la parole.
La distinction langue/ parole
En définissant le discours comme une séquence orale ou écrite, produite par un locuteur donné dans une situation de communication précise, les linguistes, d epuis Saussure, reconnaissent que le terme discours est sans doute l'un des plus polysémiques qui soit. Cette définition, quoique applicable aux principales acceptions habituellement reconnues, ne peut que rester abstraite. La notion de discours ne prend en effet véritablement un sens précis et opératoire que par opposition à l'une ou l'autre des notions avec lesquelles elle est habituellement mise en corrélation, c'est-à-dire la langue, la parole, le récit. Ainsi le discours se trouve réalisé au-delà de la séquence phrastique. Il ne peut donc se constituer que d'un ensemble de phrase.




 
Langue/discours/parole
Cependant la linguistique saussurienne qui faisait prévaloir la distinction langue/parole, lui préférant la dichotomie langue / discours puisque selon Gustave Guillaume, le terme parole référerait exclusivement à l'oral. Dans  ce sens, le terme discours est synonyme de parole et désigne l'actualisation concrète du système de la langue par un individu donné, dans une situation précise de communication. On voit ici l'opérationnalité discours en dehors du cadre de l'écriture comme chez les Beti


I.2- Le couple parole/discours chez les Beti
L'analyse du couple parole/discours se fera ici à partir de la conception de ces termes et les implications sémantiques conséquentes au niveau opératoire et expressif de la socioculture beti.
Conception de la parole et du discours 
La perspective guillaumienne nous montre que parole et discours désignent un énoncé oral articulé dans une situation de communication quelconque. Chez les Beti, cette conception prévaut aussi dans la mesure où la parole de tous les jours n'existe qu'en tant que discours particuliers. Cette parole est une matérialisation et un usage personnel de la langue qui permet au sujet humain d'extérioriser sa pensée. Chacun en use donc au même titre que la communauté. Mais chacun en use davantage par rapport à un contrat social préétabli dans un passé mémorial. Chez les Beti, la parole quotidienne ou circonstanciée peut être sacrée ou active.

  
La parole sacrée
Comment peut-on concrètement appréhender la sacralité de la parole beti ? Nous avons montré plus haut l'ascendance divine des Beti ; et nous avons souligné les implications de celle-ci par rapport à la parole qui à son tour affiche ses affinités avec le verbe génésiaque, en principe sacré. Si la parole beti est sacrée, c'est d'abord parce qu'elle s'entoure de mystère. Ce mystère s'observe généralement dans le cadre des interdits transmis par la parole. En tant que acte perlocutoire, la parole beti soumet le sujet beti à un e observation rigoureuse des prescriptions et des proscriptions. Le sujet beti, qui intériorise la parole de son parent lui rappelant qu' « il ne faut pas tuer un crapaud ou une araignée, sinon le chemin qui mène à dieu sera impossible après la mort » ou bien qu' « il faut toujours cracher sur son urine pour empêcher le malin de nous atteindre », ce sujet sait bien que toute omission ou toute contravention l'expose au danger et le condamne à la sanction pendant ou après sa vie terrestre.
« La parole acquiert encore plus de puissance à l'heure de la mort où les mots prennent l'allure d'ordres sacrésiii». Il ne s'agit pas d'une simple « allure », car chez les Beti la parole du défunt est le seul témoin de sa pensée légitime. On l'applique donc en tout respect. De sorte que tel partage de l'héritage soit effectué conformément à la volonté du défunt légataire ; tel projet affiné dans les mêmes conditions ; tel vœu appliqué à la lettre. C'est que la parole semble avoir sur les sujets beti l'ascendance d'une force divine coercitive. Cela se vérifie aussi bien dans les séances de mvet et de contes que dans les rituels à incantations (nous y r eviendrons dans la troisième partie de ce travail). Mais à regarder de près, une telle force coercitive n'est-elle pas une façon d'agir par la parole ?
La parole active
La parole beti est vivante, aussi vivante que celui qui la prononce. « Dire c'est faire », pour reprendre Austin. Dans ces conditions, on peut émettre que l'acte de parole ici, compris comme force agissante, est un « acte illocutoire » chargé de restaurer la situation décadente, de sanctionner ou de couronner, de re-donner la vie ou de tuer. A considérer le cas de l'« essié », on s'aperçoit que c'est au sortir d'une redoutable et mystérieuse cérémonie de palabre que le « Zomeloa », en compagnie des notables et des ministres du culte, prononce la parole sentencieuse qui purifie le sujet, la famille, le clan ou la tribu et le délivre de son mal.
Sur tout un autre plan l'« évàa metä » (/evamətø/) ou l' « éyok » (/eјok/), respectivement actes de bénédiction ou de malédiction officiels, sont du ressort de la seule parole active qui est supposée s'accomplir à l'instant de sa réalisation. Même si les manifestations de ces actes sont à vérifier dans un futur plus ou moins lointain, tous les Beti s'accordent sur ce que la bénédiction ou la malédiction prend effet dès l'instant du rituel ou de la circonstance. Notons cependant que dans le contexte de l'« évàa metä »et l' « éyok », tout un cérémonial entre souvent en jeu qui amplifie la sacralité du discours prononcé. Du geste le moins convaincant et grossier (présenter sa nudité à son fils) aux ingrédients et instruments les plus nobles et les moins rares (la kola, le chasse-mouche, le chapeau, le « ntum »), tout converge vers la consécration de la parole, puissante en tout lieu et toujours, remplissant, selon les besoins et les circonstances, des fonctions que l'on peut bien inventorier.
C'est dire clairement que les fonctions de la parole beti émergent des fondements religieux et de la pragmatique du discours, que la sacralité et l'action sont les conditions préalables sans lesquelles cette parole ne fonctionnerait pas.

II. DES FONCTIONS DE LA PAROLE OU DU DISCOURS
Qu'elle réponde du sacré ou bien qu'elle soit action, la parole qui s'individualise à travers le discours oral chez les Beti assume des fonctions sociales qui viennent enrichir la fonction linguistique de communication. Et ces fonctions elles-mêmes se superposent au discours ; elles sont en même temps inséparables de la fonction artistique du discours chez les Beti. De sorte que la spatialité et la temporalité participent d'une dynamique générale qui fait que, à côté de la mise en forme verbale, le talent de l'orateur soit un atout central dans la mise en situation de la parole. On peut ainsi procéder à deux types de modèle fonctionnels de la parole chez les Beti. L'un orienté vers la fonction propre à chaque acte de parole, l'autre sur sa polyvalence.


II.1- Les fonctions singulières
Ici, il est question de quatre fonctions fondamentales qui justifient globalement le discours beti, sacré ou actif, ritualisé ou littérarisé, quotidien ou circonstancié.
La fonction historique
Le discours parlé chez nous se pose comme support historique et donc document mémorial privilégié dont le locuteur en est le dépositaire au même titre, parfois, que son locuteur, sa collectivité ou son auditoire. Précisons que le talent personnel du locuteur-orateur tient une place particulière dans l'exploitation de la fonction historique du discours avant de reconnaitre que cette fonction elle-même couvre divers aspects de l'univers social beti. Ainsi des toponymes (Akom Nyada, Nkom'ottou, ...), des ethnonymes (Mvog man zë, Mvog Esso Mendana, ...), des pseudonymes, autrement dit les « mebadàn » qui confèrent une seconde identité à un sujet par rapport à une historique particulière de sa vie, des patronymes (Atangana Mbala, Evouna Bella, ...). Le même souci historique transparait aussi dans les berceuses, le Mvet ou les exordes de contes qui se doublent souvent d'une apologie ou d'une biographie quelconque convoquant, selon la circonstance, les faits et évènements personnels ou collectifs. Dans l'une des berceuses beti vulgarisée que Léon-Marie Ayissi Nkoaivtranscrit en 1996, on retrouve en filigrane l'historique du chef supérieur Atangana Ntsama.
La fonction didactique
Ici on fait appel à l'enseignement ou à l'éducation. En effet, chez les Bantou en général et les Beti en particulier la pensée que matérialise la parole n'est pas une forme plate en dépit de la plate forme commune et géographiquement étendue de l'aire beti. C'est dire que chez les Beti la conversation la plus anodine entre parents et enfants, entre époux et épouse, est toujours le lieu idoine d'un transfert d'enseignements, le fëg beti. Ce fëg beti se déploie généralement aussi à travers les contes et les fables ( on peut ainsi faire mentions de l'initiation aux qualités et aux défauts : la roublardise du renard, la ruse de la tortue, la bêtise de la panthère, l'éveil de la chauve-souris, etc.), les anecdotes (qui apportent toujours une dimension réelle sur l'expérience des adultes), les devinettes (vraie gymnastique intellectuelle qui initie les plus jeunes à la réflexion) et surtout les proverbes dont il convient de faire cas particulièrement.
« owogo na enyin , vë mëken » (/owogneηiŋvəməkœ/) c'est-à-dire , vivre c'est s'employer à l'acquisition des moyens de vitalisation, c'est se renouveler ,s'adapter.
Et parlant des garçons ou des hommes en général (sexe masculin), des épreuves qu'ils doivent braver au cours de leur existence sans se plaindre, l'on dira :
« Kulu anga Wu amos anga biali » (/kuluãgawuamosãgabiali/)Et d'ailleurs le chef Atangana Tsama C. s'était beaucoup distingué dans cette logique « Mongo beti ayiënë yege mësë ; awulu awulu abudi dis da... » (/mongobətiajienəjœgeməsœ/awuluawuluabudidisda/)
Le discours moral, donc, forme l'esprit et le cœur : le respect de la vérité (le nom renvoyant à l'histoire) , la tolérance, la solidarité, la justice, l'humanisme, il appelle à la sagesse et à la prudence. Toutes choses qui développent chez l'individu l'esprit critique, stimule la faculté d'analyse, de l'observation objective, l'imagination, le jugement le courage autant de valeurs et de qualités importantes pour l'homme.
La fonction ludique-lyrique
La fonction ludique est aussi au centre du discours Beti même si elle n'émerge qu'au cours de la ritualisation et de la littérarisation de la parole. Au-delà des devinettes qui ont leur cadre temporel prescrit, il n'est pas interdit de voir dans de nombreuses boutades, les proverbes tendancieux, les anecdotes et les devinettes qui habillent le discours une parenthèse ludique de bon aloi. Qu'importe l'endroit et le temps, ces instants sont toujours une distraction efficace pour les vrais Beti.



La fonction incantatoire
La fonction incantatoire ressortit a priori au rituel spirituel. Dans ce cadre précis, la parole exorcise, convoque les esprits ancestraux pour des besoins particuliers (soins, assises familiales, révocation des mauvais sorts, intronisation, purification, rituels agraires, etc.)


II.2- Les fonctions dynamiques
Les fonctions de la parole beti peuvent faire l'objet d'un regroupement fondé à la fois sur la polyvalence de la parole et sur la forme même du discours. Léon-Marie Ayissi a dressé une typologie pertinente en quatre "groupes fonctionnel" du discours oral africain que l'on peut bien appliquer à l'aire Beti
Le groupe unifonctionnel
Il intègre les proverbes (didactiques), les devinettes (ludiques), les textes rituels (incantatoires), les légendes (historiques), les mythes (didactiques), le bestiaire des fables (didactiques), le mémorial (historique) et les séances familiales (didactiques).
Le groupe bifonctionnel
C'est l'ensemble des discours à la fois poétiques et mélodiques ; et donc qui cumulent deux fonctions. Il s'agit des berceuses et des chantefables qui remplissent les fonctions historiques et ludiques.
Le groupe multifonctionnel
Ici prennent place les grands discours que L.-M. Ayissi Noah appelle « chants gymniques ». Il s'agit nommément des comptines, des « chants à prétexte rituel », des cantates et oratorio tels que les minken (/mikœg/) et l'ozila dont les fonctions historique, ludique, didactique et incantatoire sont superposables.
Le groupe ornemental
Il s'agit là de l'ensemble des opérations discursives associant mise en scène et Parole. On signale à cet effet la stylistique du Mvet et la stylistique tambourinée du tam-tam au cours des obsèques, véritables épanchements lyriques et ludiques qui consacrent la virtuosité de l'orateur ou du mbomo mvet.
Cet inventaire des fonctions singulières et dynamiques de la parole chez les Beti montre à suffisance que cette parole investit tous les gestes et fait de l'homme Beti. Il en découle la liaison étroite qui lie celui-ci à celle-là ; de sorte que la prise de parole devienne une entreprise existentielle et artistique dont il convient de démêler les mécanismes fonctionnels, c'est-à-dire les divers fonctionnements.


III. DU FONCTIONNEMENT DE LA PAROLE OU DU DISCOURS
Les fonctions discursives de la parole beti que nous venons d'établir confirme la thèse linguistique du fonctionnement de la langue. A cet effet, on peut poursuivre l'analyse en montrant que la culture beti dispose de multiples moyens pour mettre le dire en fonctionnement. Ces moyens obéissent à des règles communes et dynamiques au sein des communautés. Dans ces conditions la prise de parole n'apparaît plus simplement comme un acte de communication visant l'intercompréhension, elle devient en soi un moment de communion spirituelle et intellectuelle, voir mystique, à travers la littérarisation et ritualisation.

III.1- De la littérarisation du discours
La littérature orale africaine au sein de laquelle s'insère la culture orale de l'aire beti se trouve manifestement en situation artistique à travers les différents modes d'expression de la pensée. Chez les Beti du Cameroun, la parole tire sa force de sa poéticité et des procédés oratoires y afférents. L'examen de quelques mises en fonctionnement de la parole est utile ici.
L'usage des proverbes

Le proverbe Fang-Beti est une métaphore qui nourrit la conversation courante. A des circonstances particulières il acquiert un usage particulier. Ainsi il sert de mise en train dans les discours publics et apparaît dans les autres circonstances comme un argument d'autorité. L'orateur-locuteur les énonce en abondance pour soutenir son propos sans aucun souci d'explication car, l'assistance ou l'auditoire est censé être à même de décoder le sens profond de la parole articulée. Par conséquent, ceux qui écarquillent les yeux et écoutent béatement sont du coup ravalés au rang de méprisables et d'enfants car leur « épreuve qualifiante » est vouée à l'échec. 
Au fond, le proverbe beti regorge toujours en substance une moralité, une leçon ou une philosophie que l'orateur entend transmettre implicitement. Quelque soit la situation, on sait donc que le proverbe parlé est la pensé même du Beti. En voici quelques illustrations :
« Biyé bianyu bifëdë, anyu te kobö » (/bijebiaηubifədœ/aηutegkobo/) : si les lèvres sont closes, c'est que la bouche ne dit rien, peut-on traduire.
« Olam ye mpkala,oke koli ai fianga, o ke kob bebela atii »  (/olamjempala/okəkolijefiãgaokekobbəbəlaatii/): Quiconque piège avec fanfaronnade, en conditionne le déclic avec humour, trouvera la vérité en substrat.
« Obam kup ai okukomi, te di ngog kup »  (/obamkupeokukomi/tœgdigogkup/) : Si tu te fie à observer de près ce que picore la poule, tu ne pourras pas consommer son gésier.
Il s'agit là de trois proverbes qu'on peut résumer en termes de moralité aux qualités de la patience, la tolérance, le hasard des choses et surtout la permanence de la vérité
L'usage des pensées mémorielles
La pensée mémorielle peut être considérée comme les souvenirs immémoriaux qui font résurgence dans la parole quotidienne ou circonstanciée d'un individu, d'un clan ou d'une famille. Par elle, on se convainc que le lointain ancêtre ou le parent défunt avait dit quelque chose d'important. Ce quelque chose est classée comme grande leçon à immortaliser par les formules : Betara be kadgë kad nà ...(betarabekadgøkadna/), tara a kadgë dzô na...(taraakadgødzona/), na ading kobö na...(/naadiŋgəkobona/), etc.
Il faut noter que la pensée mémorielle n'est pas le proverbe ; celui-ci est héritage collectif supérieur quand celle-là est souvenir individuel et singulier. I l s'agit donc d'une technique de la citation qui met en exergue des connaissances antérieures au cœur d'autres connaissances présentes. Et il appartient au locuteur concevoir le mode d'insertion de cette pensée par une technique artistique digne d'être vue comme littéraire.
Les berceuses : mélange de biographie et de chants lyriques
Dans les berceuses, le mélange du biographique et du lyrique fait naître une œuvre d'art. La parole ici relève de littérature orale dans la mesure où, en poursuivant le but naturel de bercer le bébé, la chanteuse procède à une exploitation experte de ces connaissances en vue d'une réalisation toute fictive. Ce faisant, elle se livre à une partie ludique dont elle tire profit au même titre que l'enfant bercé. Par ailleurs, c'est faire preuve de grande virtuosité que de proposer au bébé une louange qui englobe à la fois son passé, son présent et surtout le destin qu'on lui prédit.
L'épopée : entre la réalité et la fiction
L'épopée, qu'elle soit du Mvet ou de l'Oyeng, est toujours située entre la réalité et la fiction. Le point de départ de l'histoire que le poète épique raconte est un fait ou un personnage repérable dans la réalité historique de sa société. Cependant, c'est du statut particulier du poète – dépositaire d'une faculté visionnaire - associé à l'exceptionnalité du fait et du personnage qu'émerge la possibilité d'envisager un embellissement ou une sublimation du discours. Toute la réussite d'une épopée dépend ainsi de la rupture des frontières entre le substrat socioculturel et la contribution imaginaire des joueurs de Mvet qui réponde de l'ajout des épisodes surnaturels. L'épopée d'Angon Mana en est une grande illustration au sujet de cette littérarisation de la parole qui, dans le cas du Mvet se double d'une ritualisation cruciale.


III.2- De la ritualisation du discours et de la parole
Si la littérarisation de la parole est un acte individuel, la ritualisation elle se fait collectivement à travers une « mise en scène » de la parole qui convoque le plus souvent des gestes appropriés et des instruments précis dans des situations bien délimitées. Dans cette perspective collective de l'usage de la parole, les morts et les vivants se côtoient au même titre que le visible et l'invisible. Certains rituels peuvent nous intéresser ici qui participent de la mise en scène de la parole à savoir le rite funéraire, la dot, les soirées de Mvet et les veillées.

Le rite funéraire
Le rite funéraire commence en effet lors des obsèques et constitue un cérémonial pendant lequel le discours se fait prégnant. Il est vrai que chez les Beti il est d'abord question d'un jeu de virtuosité oratoire autour de la mort ; mais la parole telle qu'elle est utilisée se fait théâtralisation. Pendant les obsèques c'est l'ebëme aWu (/ebeməawu/) ou nsili aWu qui nous intéresse. Cette partie correspond avant tout à une hiérarchisation de la prise de parole. Voici ce qu'en dit Chantal Ebale Moneze :
« Quant au nsili aWu, il comprend trois principaux moments. Le premier est celui pendant lequel le mbi ntum, patriarche représentant la famille du défunt, suivi du mbi akoang se place au milieu de l'assistance, se présente et à elle en disant son nom, puis déclare : ''si quelqu'un a un mot à dire, qu'il m'appelle de ce nom'' et enfin regagne sa place.
« le second, celui des plaintes. C'est un représentant de la famille maternelle du défunt qui intervient le premier. D'autres personnes interviendront ensuite à tour de rôle – très rarement en leur nom, mais généralement en celui d'un groupe – soit pour solliciter des éclairages sur les circonstances du décès soit pour exprimer leur compassion.
« Le troisième, le ndon aWu au (compte-rendu sur les circonstances du décès) est celui où de retour du dernier conciliabule, le patriarche qui a ouvert la série des interpellations prends la parole et répond aux questions qui lui ont été posées en insistant sur le fait que la version des faits qu'il donne est la plus crédible v».

Ces échanges de paroles ne se font pas sans manière, faut-il ajouter. Le jeu mimique entre le mbi ntum et le mbi akong rappelle aux yeux de l'assistance la volonté d'exprimer un accord préalable qui engage toute la famille ; les approbations gestuelles et vocalisées de cette famille sont la preuve que c'est la communauté qui parle à travers la voix du mbi ntum.
Une telle circonstance met aussi en valeur la maitrise de la parole, c'est-à-dire l'usage des proverbes les plus aptes à ébranler la famille éprouvées par rapports à d'éventuelles accusations, les mieux exprimer pour convaincre les sceptiques et effacer toute trace de soupçon et de mensonge. En même temps le brandissement du chasse-mouche et du ntum assiste la parole dans son entreprise argumentative, signifiant tacitement : « c'est la toute puissante voix du Zomeloa (ou du patriarche) qui parle péremptoirement au nom de toute la communauté et des ancêtres ». On voit bien que Jean Mbarga a raison d'affirmer que « chez les Beti, l'orateur n'est pas un penseur solitaire mais un membre de sa communauté (parlant avec elle), bâtissant son discours avec elle pour un consensus librement accepté et engageant ... »
La cérémonie de dot
Le cérémonial de dot est un acte commémoratif et remarquablement symbolique dans l'air culturelle Béti. Au cours de ce cérémonial le jeu rhétorique et oratoire instituent la parole comme médium entre les deux familles en présence et représentée chacune par une virtuose de la parole, Zomeloa . Officiant seul ou accompagné d'un tiers, il tient le plus souvent des accessoires rituels (chasse-mouche, témoin ou ntum ) qui lui confère le pouvoir et consacre sa parole. Ses interventions sont entrecoupées de silences expressifs. Ces silences qui équivalent bien la ''parole parlée' interviennent aussi lorsque l'orateur formule un proverbe et veut s'assurer de la pertinence de celui-ci en consultant son accompagnateur – qui acquiesce de la tête – à défaut, son public qui l'approuve par de simples interjections. l'assistance vis-à-vis participe à cette mise en scène. Son représentant échange discrètement avec ses acolytes devant un public conventionnellement surpris. C'est dire que entre les gestes, les silences, les proverbes et discours ordinaires, la parole se trouve en situation de ritualisation.


Le Mvet
Les soirées de Mvet sont un vrai lieu de représentation mélodramatique. Le Mbomo Mvet , personnage au costume pittoresque, officie à l'estrade, face à une assistance qui joue aussi le rôle de personnage figurant – le Mbomo Mvet peut aussi officier au milieu de l'assistance. Quoiqu'il en soit, ce qui compte, c'est surtout la gestuel du joueur de Mvet qui accompagne les "paroles chantées". Il peut se lever, simuler la course du personnage en action dans l'épopée qu'il rend ; changer la mimique, solliciter la réaction du public, son approbation ou sa désapprobation. Surtout, souligne L.-M Ayissi Noah,
On remarque le génie du poète-acteur dans la maîtrise d'art total du fait de la parole et de la gestuelle, du rythme et de la mélodie, de la force des images et de la parfaite coïncidence de leur nature végétale, animale et humaine, une saisissante vision ''de la surnature''vi.

Donc, la grande confusion entre le "Mbomo Mvet", personne réelle et les faits et gestes des personnages épiques qu'il imite impose une distance entre lui et le peuple. Cette distance élève les esprits de l'assistance qui consentent à faire le voyage vers un univers divin, « surnaturel » ; et justement l'univers mythique de l'épopée est réellement un discours rituel d'initiation mystico-religieuse. Un discours, un rituel qui n'opère que dans la nuit comme pour rappeler son affinité avec « faire la sorcellerie »/ « sorcellerie évocatoire ».
Les veillées
Comme les rituels, du Mvet, dans l'aire culturelle Beti, les veillées sont des séances au cours desquelles, une famille, un regroupement, un clan se rassemble sous la conduite des plus âgés pour procéder à l'initiation aux contes, fables, légendes devinettes etc. Ici la parole fonctionne rituellement en ce sens que l'acte de la parole est conditionné par des prescriptions collectives "sous serment», voir "sous contrat verbal" : « On ne conte pas de jour sinon ton oncle maternel mourra ». Pour conter pendant les veillées, il faut introduire son histoire par formule rituelles du genre afian ; et l'auditoire de répondre par andzeg. De même chaque conteur doit finir sa narration avec des termes consacrés qui introduit un autre conteur : « bisseg ai minyè énon assi za ?» (/bisegemijεenÕgasiza/) ou bien comme mentionne Justin Mbah Onana : 
« ay biseg ay minya enon a yad, avoo ; Ngë ma voué tsit ana za a non énam. Traduction : et de foie et les boyaux sur le lit d'en face, voo ! Si je tuais un gibier, qui se trouve limité dans le champs de l'oralité vii».

A la guise de l'assistance ou bien selon la volonté d'un participant on désigne collectivement celui qui doit prendre la parole.
Au total dans la pratique du discours chez les Beti, on voit bien que la frontière entre la parole ritualisée et « la parole littérarisée » est très fragile. Cela dans la mesure où littérature et rituel fonctionnent dynamiquement par rapport aux dispositions d'une société communautaire dont le discours émerge d'une « parole viscérale viii».


Conclusion générale

Ce propos sur le discours et la parole chez les Beti du Cameroun a été le lieu pour nous de revisiter trois aspects fondamentaux de la pratique discursive orale chez les Beti. En resituant la parole dans les contextes sacré et actif, nous avons rétabli la conception synonymique et dynamique de la parole et du discours chez les Beti (celle-là même qui contraste avec les approches linguistiques anciennes) et posé les bases d'un examen fonctionnel de la parole-discours Beti.
L'inventaire illustré des fonctions du discours parlé nous a permis de mettre en exergue les fonctions didactique, historique, ludique et incantatoire ; on aura observé que celles-ci peuvent faire l'objet d'un autre groupement selon le nombre et la qualité des fonctions exploitées dans une situation discursive.
L'analyse du fonctionnement de la parole à quant à elle prouvé que quotidiennement ou circonstanciellement, la parole chez les Beti se soumet en permanence à la littérarisation ou à la ritualisation, voire à la littérarisation et à la ritualisation à travers des acte illocutoires et perlocutoire ; à travers l'usage individuel comme celui collectif de la parole.
A ce titre, il convient néanmoins de souligner que chez les Beti, la parole peut se transformer en simple production sonore et conserver sa valeur et sacrée et active. Pendant l'essani, par exemple, le roulement du tam-tam est un discours décrypté par la communauté. Si le joueur du tam-tam articule instrumentalement le ndàn du défunt, de son vivant ses proche l'interpellaient en vocalisant le même ndàn par un « cri distinctif ». Telle apparait aussi l'usage de l'oyenga lors des naissances.
Toutes ces considérations faites, nous pouvons nous accorder avec la sagesse beti, fëg beti, qui réduit l'homme à sa parole : nnon otimbigi a mekol, mod atimbigi anyu (nonotimbigiamekol/modatimbigiaηu/).


BIBLIOGRAPHIE


ABEGA S. C., L'Essana chez les Beti, Yaoundé, CLÉ, 1987.
AYISSI NOAH, L.-M., Contes et berceuses du Cameroun suivis de « L'Épopée d'Angon Mana et de d'Abomo Ngëlé », Yaoundé, Le Panthéon-Épargne FESS CAMEROUN, 1996, p.186.
BEBEY F., Le fils d'Agatha Moudio, Yaoundé, CLÉ, 1998, p.25-26.

EBALE MONEZE, C., « Cérémonies d'inhumation et construction de la représentation sociale du défunt chez les Beti du Cameroun », in Annales de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences humaines, U.Y.I, vol.1, n°5, 2006, p.163-183.
LABURTHE-TOBRA P., Les Seigneurs de la forêt. Essai sur le passé historique, l'organisation sociale et les normes éthiques des anciens Beti du Cameroun.

MBAH ONANA, J., « de la littérature orale Beti : théorie d'une littérature » in Recherches ouvertes, N°5, Revue semestrielle du Cercle d'Études Littéraires et Artistiques, Yaoundé, Juillet 1982, p.5-16.
MBARGA, J., L'Art oratoire et son pouvoir en Afrique : le cas des Beti du Cameroun, Yaoundé, Saint-Paul, 1997.
MVIENA-OBAMA P., L'Univers culturel et religieux du peuple Beti, Yaoundé, Saint-Paul, 1963.


TABLE DES MATIÈRES
Introduction générale ..................................................................... 1

I. PAROLE ET DISCOURS : APPROCHE LINGUISTIQUE
ET SOCIOCULTURELLE............................................................. 2
I.1- Parole et discours en linguistique générale...............................2
La distinction langue/ parole..............................................2
Langue/discours/parole..........................................................................3
I.2- Le couple parole/discours chez les Beti....................................3
Conception de la parole et du discours.................................3
La parole sacrée.............................................................4
La parole active ............................................................5


II. DES FONCTIONS DE LA PAROLE OU DU DISCOURS .................... 6
II.1- Les fonctions singulières ............................... ...................6
La fonction historique .....................................................6
La fonction didactique ....................................................7
La fonction ludique-lyrique................................................8
La fonction incantatoire ............................................................9
II.2- Les fonctions dynamiques ..........................................................9
Le groupe unifonctionnel..................................................9
Le groupe bifonctionnel ...................................................9
Le groupe multifonctionnel .............................................9
Le groupe ornemental ...................................................10

III. DU FONCTIONNEMENT DE LA PAROLE OU DU DISCOURS .........10
III.1- De la littérarisation du discours .................................................11
L'usage des proverbes ...................................................11
L'usage des pensées mémorielles ......................................12
Les berceuses : mélange de biographie et de chants lyriques ......12
L'épopée : entre la réalité et la fiction .................................13
III.2- De la ritualisation du discours et de la parole ........................13
Le rite funéraire ...........................................................14
La cérémonie de dot ......................................................15
Le Mvet ...................................................................16
Les veillées ................................................................16

Conclusion générale .................................................................... 18
Bibliographie ............................................................................ 19
Table des matières ...................................................................... 20
i Dans son livre Les Seigneurs de la forêt. Essai sur le passé historique, l'organisation sociale et les normes éthiques des anciens Beti du Cameroun, Philippe Laburthe-Tobra affirme que l'Ati était « une langue sacrée »

ii F. Bebey, Le fils d'Agatha Moudio, Yaoundé, CLÉ, 1998, p.25-26.

iii F. Bebey, op. cit., p.26.

iv L.-M. Ayissi N., Contes et berceuses du Cameroun suivis de « L'Épopée d'Angon Mana et de d'Abomo Ngëlé »,Yaoundé, Le Panthéon-Épargne FESS CAMEROUN, 1996, p.186.

v C. E. Moneze , « Cérémonies d'inhumation et construction de de la représentation sociale du défunt chez les Beti du Cameroun », in Annales de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences humaines, U.Y.I, vol.1, n°5, 2006, p.165-166.

vi L.-M. Ayissi Noah, op. cit., p.195.

vii J. Mbah Onana, « de la littérature orale Beti : théorie d'une littérature » in Recherches ouvertes, N°5, Revue semestrielle du Cercle d'Etudes Littéraires et Artistiques, Yaoundé, Juillet 1982, p.11.

viii J. Mbah Onana , ibid.


Article publié par
Innocent Claude Mbarga Onana,
Université de Yaoundé I, Ecole Normale Supérieure.
Avec la collaboration de
ETOUNDI ESSOMBA Emmanuel
MANGA Christian
MBARGA OWONA Jean Paul